Les philosophes de la perception auditive ont récemment fait progresser notre compréhension de la nature des sons, compris comme les objets de la perception auditive, mais les débats se sont focalisés principalement sur la nature des sons naturels, résultant d’événements vibratoires dans nos environnements physiques proches, et seulement dans une moindre mesure sur les sons enregistrés et les images sonores. Il est toutefois contestable de ranger tous les sons numériques dans la catégorie des enregistrements, car il existe des sons numériques synthétiques. Il est également discutable de les subsumer sous la catégorie plus large des images sonores dans la mesure où certains événements sonores qui peuplent notre quotidien numérique, tels les alarmes et les notifications, ne visent pas à représenter d’autres sons qu’eux-mêmes, mais à performer des actes d’avertissement ou de notification.
Ce projet se fonde sur la prémisse selon laquelle les sons numériques ont des conditions d’existence et d’identité distinctes de celles des sons naturels, ce qui nécessite de construire une ontologie philosophie distincte pour les sons numérique. Selon l’hypothèse envisagée, les conditions d’identité et d’existence des sons numériques ne sont pas dépendantes d’un événement vibratoire au sein d’un milieu de propagation, mais plutôt d’une structure de données qui joue un rôle analogue à celui d’une notation, et explique la répétabilité et la portabilité des sons numériques. Cette hypothèse a également des conséquences sur les théories de la notation des musiques numériques, et sur la question du réalisme phonographique appliqué aux enregistrements sonores numériques.
Équipe Ircam : Analyse des pratiques musicales